Et si l'histoire des rgions frontalires n'tait pas seulement dicte par la frontire Partage entre la France et l'Espagne lors du trait des Pyrnes (1659), la Cerdagne est au centre de cette recherche sur les relations entre socit et territoires. Mais, cette enqute va bien au-del du cadre gographique et chronologique impos par la frontire. En effet, les sources documentaires sont plurielles et invitent sans cesse changer de rythme, d'chelle, de postes d'observation et de formes de rcit pour saisir les changements dans la longue dure. Des paradoxes y apparaissent d'abord comme autant d'nigmes laisses sur le chemin. Trois acteurs y jouent les premiers rles. En premier lieu, une ville perche au coeur de ces montagnes domine et faonne du haut de ses privilges et de ses prtentions cette rgion ; elle finit pourtant bout de souffle et la trane d'une croissance rurale et rgionale. La seigneurie apparat ensuite comme un horizon du quotidien. Elle n'est pas ce monstre avide et aveugle si souvent dcri, mais elle permet, bien au contraire, l'exploitation du territoire par les paysans. Enfin, les " maisons ", vritables archtypes du monde pyrnen, sont reprsentes par un hritier unique charg de conserver un patrimoine rput inalinable et indivisible. Pourtant, elles n'en participent pas moins un march foncier qui renforce la concentration des terres au profit d'une minorit. Par ailleurs, le rgime de l'hritier universel est galement cens freiner l'apparition de nouvelles cellules domestiques. Or, cela n'empche pas le nombre de maisons de tripler entre la fin du XVe sicle et la fin du XVIIIe sicle. L'ensemble de ces contradictions apparentes ne trouve de solutions que dans l'analyse serre des relations successives que noue une socit avec ses espaces, pour exploiter et rinventer ses territoires.